Coronavirus et environnement ou pourquoi notre modèle économique ne peut pas sauver la planète

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Coronavirus et environnement ou pourquoi notre modèle économique ne peut pas sauver la planète

La baisse des rejets de CO2 depuis quelques semaines 

Visuel de la NASA

La pandémie semble souligner une corrélation inévitable : moins on produit moins on pollue. Dans le Nord de l’Italie, le service européen Copernicus rapportait que selon les observations satellites, les concentrations de dioxyde d’azote (NO2) montrent “une tendance à une réduction graduelle d’environ 10% par semaine au cours des quatre à cinq dernières semaines”. Le NO2 est un gaz polluant issu des activités humaines. Même constat en Chine, selon une estimation de l’organisme Centre for Research on Energy and Clean Air (CREA). La Chine est le premier pays émetteur mondial de gaz à effet de serre. Elle a vu ses émissions chuter d’au moins un quart au mois de février comparé à 2019.

Le coronavirus ne manque pas non plus de montrer certaines incongruités. Par exemple, la règle de l’Union Européenne du “use it or lose it” relative aux créneaux aéroportuaires. Les compagnies aériennes sont en effet tenues d’exploiter 80 % des créneaux qui leur sont attribués. Si elles ne le font pas, elles risquent de perdre leur droit aux créneaux horaires des prochaines saisons. Ainsi, pour garder leurs précieux créneaux horaires, les compagnies aériennes font voler leurs avions à vide. On vous laisse imaginer l’empreinte carbone… On ne manquera pas non plus de noter le dynamisme du secteur des jets privés. Une compagnie suisse a précisé que les commandes de jets privés, en rapport avec les régions à risque, ont augmenté de 30%. Si les jets privés sont très polluants, chacun d’entre eux brûlera 40 fois plus de carbone par passager que les vols commerciaux normaux. 

Si ces nouvelles vont dans le bon sens pour le climat, attention au retour de bâton, à l’instar d’AirFranceKLM qui demande déjà de reculer sur les objectifs climatiques (1) pour des raisons économiques.

 

L’explosion des inégalités 

La crise du coronavirus renforce immanquablement les inégalités déjà existantes dans notre société. On assiste en effet à une opposition nette entre les salarié.e.s (dont de nombreux cadres) qui peuvent télétravailler et les salarié.e.s des industries et activités nécessaires à la (sur)vie du pays (santé/alimentation…), avec en première ligne les femmes.

Les personnels de soin, les fonctionnaires (police, professeurs), mais aussi le prolétariat urbain (éboueurs, agents de sécurité…) sont en première ligne pour endiguer l’épidémie de covid19 […] tandis que les classes supérieures […] ont déserté les villes pour se mettre à l’abri. Et de cela, nous ne parlons pas.” –  Source Huffington Post (2)

Par ailleurs, être confiné.e dans un petit appartement à plusieurs (parfois insalubre) n’est pas du même effet que le confinement dans une grande maison avec jardin (parfois une résidence secondaire en campagne). “Mais tandis que les personnels soignants sont mobilisés et que les salarié.e.s modestes nettoient et approvisionnent nos villes, jour et nuit, au risque d’être contaminé.e.s à leur tour, leurs enfants, pendant ce temps, ne sont pas au vert.(2)

Les inégalités résident également en matière de continuité pédagogique pour les enfants. Suivre un cours sur un téléphone portable n’a jamais été facile, tandis que disposer d’un ordinateur portable, d’une chambre à soi, d’une imprimante, reste un bien très inégalement partagé.(2)

Notre système de santé a été considérablement affaibli ces dernières années : suppression de lits, suppression de postes, économies sur le dos du manque de moyens… Le premier anniversaire de la grève hospitalière en témoigne. La situation française reste néanmoins moins catastrophique que le système de santé à l’américaine. A noter le triste exemple d’une patiente américaine qui s’est vu facturé son traitement contre le COVID19 plus de 34 000 $. 

 

Les multinationales renforcées

  A l’image d’Amazon, les grandes entreprises pourraient récupérer les ventes non réalisées des petits indépendants. Tandis que les salariées d’Amazon continuent de travailler la peur au ventre (3), les librairies fermées craignent que leur chiffre d’affaires ne soient récupérés par les géants de la vente en ligne (4)C’est pourquoi, de nombreux écrivains, intellectuels, éditeurs et syndicats signent une tribune pour le boycott d’Amazon et et pour un soutien massif au secteur du livre! 

« Il ne faut pas rouvrir les librairies mais soutenir à toute force le secteur du livre contre cette concurrence monstrueuse (d’Amazon) qui côtoie l’indignité. »  – Source Médiapart (5)

Il en va de même dans le secteur alimentaire, avec l’annonce ce lundi 23 mars de l’interdiction des marchés alimentaires de plein air. Comment expliquer que les citoyen.nes seraient plus exposé.e.s au coronavirus sur un marché en plein vent que dans un supermarché (espace clôs) de la grande distribution? Même la FNSEA, les Jeunes agriculteurs et l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture soutiennent dans un communiqué commun que “le risque de contamination n’est pas plus élevé que dans les autres formes de commerce” (6)Les préfets et les maires pourront déroger à cette interdiction. Sans dérogation, les petits producteurs des marchés interdits seront durement touchés par le manque à gagner des semaines à venir. D’autant plus qu’il est déjà compliqué de tirer un revenu décent face aux grandes surfaces et leurs prix toujours plus bas. Dans cette situation, que faire des denrées périssables ? Pour certains, la vente sur les marchés est la seule manière de vendre leurs produits.

Là, encore deux visions du monde s’affrontent, deux manières de produire et de commercialiser des produits de première nécessité ou des œuvres culturelles…

Faudrait-il appliquer la même gestion de crise face à l’urgence climatique ? 

Ce que montre la crise du coronavirus, c’est qu’ “il est possible que des gouverne­ments prennent des mesures urgentes et radicales face à un danger imminent, y compris des mesures (très) coûteuses. Et il est possible que ces mesures soient ac­ceptées par la population (7).” Cette période de confinement doit nous permettre, militant.e.s climatiques, de revoir nos modes de communication et notre lutte contre le dérèglement climatique.

Le virus représente un danger concret, proche et immédiat. A l’inverse, [de nombreuses personnes ont encore l’impression] que le changement climatique se produira d’abord pour les autres, dans le futur et ailleurs. Attention à ne pas parler trop vite cependant, la crise du coronavirus et les mesures qui en découlent sont temporaires, à l’inverse du changement climatique et des mesures que nous prendrions pour lutter contre dès maintenant. Enfin, “les mesures de lutte contre le coronavirus sont des mesures imposées par l’état de nécessité : nous ne les avons pas choisies, nous les subissons.” – Source Le Monde (7)

Les me­sures pour lutter contre le changement climatique devront être choisies(8). Voilà l’une des différences fondamentales entre la crise du coronavirus et l’urgence climatique. “Réduire nos émissions à l’échelle mondiale, vous ne le faites pas avec des techniques, vous le faites avec des comportements. C’est la leçon.” décrypte Dominique Bourg (8). Selon lui, la crise que nous traversons est une étape très importante dans le processus d’effondrements au sens de Pablo Servigne et Raphaël Stevens.

Dès que vous avez des déstabilisations des écosystèmes, vous avez des perturbations dans les répartitions des populations et dans leur conduite. La période de stabilité écosystémique et de stabilité de la société qu’on a connue est en train de se refermer. […] [Le Covid19] nous contraint à revenir sur les fondamentaux, à comprendre qu’on est en train de changer d’époque, et qu’on ne peut pas continuer nos modes de vie. ” – Source 20minutes (8)

Sources :

  1. Novethic – 19 mars – Le coronavirus risque de saper tous les efforts pour lutter contre le changement climatique 
  2. Huffingtonpost – 19 mars – Avec le coronavirus et le confinement, le scandale des inégalités sociales éclate 
  3. Libération – 19 mars – Sollicités comme jamais, les salariés d’Amazon travaillent la peur au ventre    
  4. Marianne – 17 mars – Coronavirus : “La disparition du monde sauvage facilite les épidémies”
  5. Médiapart – 24 mars – Pour le boycott d’Amazon! Pour un soutien massif au secteur du livre!
  6. France Bleu – 24 mars – Coronavirus : tous les marchés désormais interdits pendant la période de confinement 
  7. Le Monde – 19 mars – Après le confinement, il nous faudra entrer en résistance climatique” Tribune d’un collectif de personnalités 
  8. 20minutes – 19 mars – Coronavirus : « C’est le début d’une déstabilisation en cours, il n’y aura pas d’après », selon le philosophe Dominique Bourg [philosophe et professeur honoraire à l’université de Lausanne]

Revue de presse pour aller plus loin  :


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